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Prescription de l’action en réduction : le 2 n’est pas dans le 5 !

Dernière mise à jour : 17 févr.

Dans un arrêt en date du 7 février 2024 (Cass. 1ère civ. 7 février 2024, n°22-13.665), la Cour de cassation devait se prononcer sur l’application de l’article 921, alinéa 2, du Code civil, relatif à la prescription de l’action en réduction pour les successions ouvertes à compter du 1er janvier 2007.


Aux termes de ce texte, « Le délai de prescription de l’action en réduction est fixé à cinq ans à compter de l’ouverture de la succession, ou à deux ans à compter du jour où les héritiers ont eu connaissance de l’atteinte portée à leur réserve, sans jamais pouvoir excéder dix ans à compter du décès ».


Dans l’affaire en cause, l’un des héritiers reprochait à la Cour d’appel d’avoir jugé recevable, en violation de ce texte, l’action en réduction engagée par ses frères et sœurs, qui avaient certes agi dans le délai de cinq ans suivant l’ouverture de la succession mais alors qu’ils avaient eu connaissance de l’atteinte portée à leur réserve depuis plus de deux ans. Pour l’auteur du pourvoi, en effet, et contrairement à ce qui avait été jugé, ce second délai devait s’appliquer en tout état de cause, et pas uniquement à l’expiration du premier délai de cinq ans.


La Cour de cassation valide au contraire le raisonnement suivi par les juges du fond, rejetant par conséquent le pourvoi.

 

Elle rappelle pour cela qu’il résulte de l’article 921, alinéa 2, du Code civil, que « (…) pour être recevable, l’action en réduction doit être intentée dans les cinq ans à compter du décès ou, au-delà, jusqu’à dix ans après le décès à condition d’être exercée dans les deux ans qui ont suivi la découverte de l’atteinte à la réserve. Le moyen, qui, en soutenant que ces dispositions imposent, dans tous les cas, que le demandeur agisse dans les deux ans du jour où il a découvert l’atteinte à la réserve, postule le contraire, n’est donc pas fondé ».


Note


Issu de la réforme du 23 juin 2006, l’article 921, alinéa 2, du Code civil, qui fixe les règles applicables à la prescription de l’action en réduction fait référence à trois délais de 5 ans, 2 ans et 10 ans, dont la combinaison est parfois discutée.



Pour une doctrine majoritaire ce « 5-2-10 » peut se comprendre de la façon suivante :


  • Le réservataire peut agir en réduction dans les cinq ans suivant l’ouverture de la succession. Pendant cette première phase, aucune condition particulière ne lui est imposée.

  • S’il n’a pas exercé l’action pendant ce premier délai, il dispose d’une « deuxième chance » mais, cette fois, deux conditions doivent être réunies :

    • Il doit agir dans les deux ans suivant la découverte (par hypothèse tardive) de l’atteinte portée à sa réserve.

    • En tout état de cause, il ne peut plus agir 10 après l’ouverture de la succession.


Cette doctrine ne fait toutefois pas totalement l’unanimité. En effet, il a déjà été soutenu, à la faveur d’une interprétation très littérale de l’article 921, alinéa 2 précité, que le délai de deux ans s’appliquait en toutes circonstances, y compris pendant le premier délai de cinq ans.


Cette dernière thèse (dont se prévalait l’auteur du pourvoi) est condamnée par la Cour de cassation dans son arrêt qui dit bien que le délai de deux ans concerne la prescription des actions intentées au-delà de la première période de cinq ans.


Plus logique au regard de la structure du texte (pourquoi sinon ne pas se contenter des délais de 2 et 10 ans ?), cette solution a également le mérite d’éviter que des prescriptions puissent être acquises au bout d’un très (trop) court délai (deux ans à compter de l’ouverture de la succession si l’on prouve que l’héritier a immédiatement eu connaissance de l’atteinte portée à sa réserve).

Dit autrement, la prescription ne peut pas être inférieure à cinq ans, et dans le « 5-2-10 », le 2 n’est pas dans le 5 !

 

 David Epailly



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Remerciement spécial à L. Blush :






 

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