On sait que la Cour de cassation, après avoir un temps retenu une solution opposée (v. Cass. 1ère civ. 8 nov. 2005, n° n° 03-13.890) affirme désormais avec constance que l’occupation gratuite d’un immeuble, même de longue durée, ne peut s’analyser en une libéralité indirecte que si l’on parvient à démontrer positivement l’existence d’une intention libérale du propriétaire (v. par exemple, récemment, v. Cass. 1ère civ. 12 janvier 2022 ; n°20-14.455).
Si cette jurisprudence fournie est souvent favorable à l’occupant, le présent arrêt (Cass. 1ère civ., 2 mars 2022, pourvoi n°20-21.641) démontre qu’il n’en est pas toujours ainsi.
En l’espèce, deux enfants étaient nus-propriétaires d’une maison sous l’usufruit de leur mère, laquelle avait permis à l’un d’eux d’occuper gratuitement une partie de l’immeuble. Les deux enfants avaient par ailleurs réalisé divers travaux sur le bien.
Après le décès de l’usufruitière, un conflit se noue entre les deux héritiers, notamment sur l’existence d’une libéralité indirecte au profit de l’occupant et sur le montant du rapport compte tenu des travaux effectués par ce dernier.
Sur ces deux points (l’arrêt fait l’objet d’une cassation partielle sur un autre motif), la Cour de cassation approuve la Cour d’appel qui après avoir relevé l’intention libérale de la défunte, retient l’existence d’une libéralité rapportable égale au montant des loyers non perçus, diminué simplement de la valeur des « réparations et frais d’entretien » (incombant normalement à l’usufruitière) pris en charge par le donataire, et non, comme il le réclamait, de la valeur de la totalité des travaux qu’il avait financée (en ce compris des « grosses réparations » au sens de l’article 605 du Code civil).
« (…) La cour d'appel a relevé que [C] [R] avait consenti à M. [L] [O], avec une intention libérale, l'usage gratuit de la partie d'une maison dont elle avait conservé l'usufruit et dont celui-ci était nu-propriétaire avec son frère. Elle a retenu, à bon droit, que M. [L] [O], en ce qu'il cumulait les devoirs d'un locataire, auquel sa position d'occupant l'assimilait, et les obligations issues de la nue-propriété de l'immeuble, ne pouvait réclamer à l'usufruitière le remboursement des travaux qui, tout en constituant des réparations autres que locatives mises à la charge du bailleur par l'article 1720 du code civil, relevaient du domaine des grosses réparations imputées au nu-propriétaire par l'article 605 du même code. Elle en a exactement déduit que celui-ci était tenu d'une indemnité de rapport égale aux loyers qui auraient dû être payés si les lieux avaient été loués, après déduction du seul montant des réparations et frais d'entretien incombant normalement à l'usufruitière (…)
Vous trouverez plus d'informations sur le rapport des donations indirectes dans la documentation ALS.not.
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